« Bénissez ceux qui vous persécutes. Souhaitez leur du bien et non pas du mal. » (Rm 12,14)
Chers amis et fidèles du diocèse de Chartres,
Oui, la Parole de Dieu nous prend toujours à contre-pied. Comment vivre ces moments de drame et de violence ? N’est-ce pas en nous appuyant sur la puissance de la Parole de Dieu ? Bien entendu, nous ne sommes pas des moutons même si le Christ accepta l’opprobre et la mort sans résister. L’État doit reconsidérer ses choix pour prévenir les citoyens de la barbarie islamiste. Mais, nous chrétiens, devons être debout dans l’adversité comme nous y invite l’apôtre Paul : « Oui, tenez bon, ayant autour des reins le ceinturon de la vérité, portant la cuirasse de la justice, les pieds chaussés de l’ardeur à annoncer l’Évangile de la paix, et ne quittant jamais le bouclier de la foi, qui vous permettra d’éteindre toutes les flèches enflammées du Mauvais. Prenez le casque du salut et le glaive de l’Esprit, c’est-à-dire la parole de Dieu. » (Eph 6,14-17)
Dès ce samedi soir, nous vivrons les messes de la Fête de la Toussaint. Toutes nos paroisses s’emploient à les préparer pour que nous honorions les saints et les saintes de l’Église qui ont marqué 2000 ans de Christianisme. C’est eux qui ont fait notre histoire. Ils ont transformé leur foi et leur amour de Jésus-Christ en de multiples actes concrets, bâtissant les hôtels-Dieu, créant les universités comme la Sorbonne, établissant des écoles dans nos campagnes telles les sœurs de saint Paul de Chartres, établissant des centaines d’abbayes où les sciences et les lettres étaient enseignés et où l’on recopiait les grands textes de l’antiquité, œuvrant pour un nouvel art de vivre comme Frédéric Ozanam, etc. À travers leurs vies et leur foi, l’histoire de France a été illuminée par le Christ, même si certains membres de l’Église ont pu succomber aux mauvais travers de leur époque. Aujourd’hui, nous sommes fiers des saint Irénée, saint Martin, saint Bernard, sainte Jeanne d’Arc, saint Vincent de Paul, Saint Jean-Marie Vianney, sainte Thérèse de l’Enfant Jésus, etc. Ils sont si nombreux sur la terre de France, ils sont l’âme de notre pays.
Nous aurions aimé vivre cette fête de la Toussaint sans ce climat de violence et de peur. La pandémie qui oblige un nouveau confinement et les attentats qui nous ont frappés directement sont là pour nous troubler et nous faire perdre la joie de la foi. Mes amis, cela est bien naturel. Notre colère elle-même est normale. Nous ne sommes pas indifférents à la folie. Nous sommes sensibles au mal donné gratuitement qui tue des personnes innocentes venues prier en leur église Notre-Dame.
Nous avons reçu aussi des messages de personnes musulmanes qui expriment leur soutien et leur solidarité avec les chrétiens. Citons pour l’exemple Fateh, journaliste et fondateur d’un site sur l’Islam qui nous écrit : « Permettez-moi, après l’effroyable attentat survenu ce matin à Nice, de dire par ces quelques lignes ma compassion et ma solidarité à l’ensemble des catholiques. Nous ne trouvons pas les mots pour qualifier ce triple assassinat terroriste commis par un barbare dans une basilique, lieu de culte, lieu sacré par excellence […] qui a ôté la vie à des fidèles venus chercher la paix et le recueillement dans la prière. J’ignore si cela a un grand sens, mais il me tient à cœur de témoigner à l’ensemble des chrétiens mes condoléances et mon soutien. Je vous saurai gré de faire savoir que votre peine comme votre colère et votre sidération sont nôtres. Puissent la paix triompher et s’installer définitivement. »
Avec la foi, nous unissant au Christ souffrant dont le saint Sacrifice se prolongera tant que l’homme fera le mal, transformons notre colère en énergie en vue du bien. Engageons nos forces dans une prière quotidienne et fidèle, dans le service des plus faibles par des appels ou des visites, dans l’animation de moments de qualité en nos foyers, dans l’étude de la Parole de Dieu et des textes du Magistère. Comment ne pas voir un don de la Providence quand le saint Père François nous donne un texte profond sur la Fraternité alors que nous constatons l’absence de fraternité dans ces faits dramatiques ? Puisons là des ressources et des encouragements pour susciter une relation fraternelle concrète dès ces prochains jours. N’attendons pas plus tard. C’est aujourd’hui que nous pouvons reprendre ce que je vous écrivais dans mon message d’hier mais écrit avant l’annonce du confinement et des attentats : faire que nos foyers soient de véritables églises domestiques !
Dans ces moments troublés, la bonne nouvelle est que nous allons célébrer les messes prévues pour la Toussaint. Venez en avance pour prier, vous préparer et aider à l’accueil. Conformez-vous aux règles sanitaires, en respectant les espaces demandés. Soyez vigilants pour votre sécurité sans pour autant cultiver la peur ; en cas de problème, n’hésitez pas à appeler la police au 17. La vie continue et nous ne pourrons pas nous résoudre à nous laisser arrêter dans notre liberté de culte même par des menaces. En ce sens, ce que nous avons vu est vraiment grave, mais il est des pays où ces faits et ces persécutions sont quotidiens ; là nos frères et sœurs chrétiens ont appris à vivre courageusement leur foi. L’Évangile des Béatitudes est celui de la fête, dans Matthieu 5. La première est « Heureux les cœurs purs, ils verront Dieu ». C’est une merveilleuse promesse de vie éternelle. La septième est « Heureux les artisans de paix, le Royaume des Cieux est à eux ». Quelle belle vocation que la nôtre : espérer que les hommes et les femmes s’associent pour bâtir la civilisation de l’Amour dans le respect des différences. La neuvième est « Heureux êtes-vous si l’on vous insulte, si l’on vous persécute et si l’on dit faussement toute sorte de mal contre vous, à cause de moi. Réjouissez-vous, soyez dans l’allégresse, car votre récompense est grande dans les cieux ! » Bien entendu, c’est si difficile de croire que l’on puisse subir ainsi le mal sans se venger pour que jaillisse le témoignage de la Vie donnée par le Christ. Pour certains cela peut aller jusqu’au don de leur vie, accepté comme un témoignage en vue de la conversion des peuples. C’est le don du martyr qui associe la foi en la Résurrection de Jésus, le refus du mal et l’acceptation de l’offrande de sa vie pour un projet plus grand que soi-même, le Salut du genre humain. Gardons le cœur connecté au Christ, relevons la tête et vivons pleinement.
Un seconde bonne nouvelle est que nous pourrons célébrer normalement les messes lundi 2 novembre pour prier pour les défunts. Aussi je vous encourage à participer à la messe ce jour-là. Venez nombreux pour demander la grâce du Salut pour ceux et celles qui sont morts.
Durant le confinement qui arrive, j’ai demandé aux prêtres et aux fidèles que soient ouvertes nos églises autant que faire se peut. Arrêtez-vous durant votre sortie du jour pour une visite au Saint Sacrement, pour un chapelet (ou même une dizaine !), pour un temps d’adoration eucharistique, selon vos possibilités. Les prêtres seront là aussi pour les confessions. Ils pourront donner la sainte communion hors de la messe pour les fidèles qui s’y seront préparés. Les visites à domicile peuvent être demandées aux prêtres comme aux diacres, ainsi qu’aux membres de nos équipes de visites des malades. Utilisez vos téléphones et vos tablettes pour garder le contact et prendre des nouvelles. Prenez soin les uns des autres et demandez de l’aide si besoin. N’ayez pas peur de nous déranger.
Je prie en cette fête pour les soignants dont la charge augmentera dans les semaines à venir. Merci de vos soins et de votre accueil. Je sais combien cela est précieux : ma mère, âgée, ayant fait une mauvaise chute me disait hier combien à l’hôpital de Tourcoing où elle a passé une journée d’examens, elle fut merveilleusement prise en charge. Merci à vous hommes et femmes qui vous donnez tant. Je prie aussi pour les équipes éducatives au sein de nos établissements scolaires. Vous faites un métier passionnant et tellement nécessaire pour que nos enfants et nos jeunes puissent grandir, s’épanouir, apprendre et ainsi envisager leur avenir. J’aimerais visiter certains établissements durant le temps de confinement pour vous dire que nous vous soutenons. Bravo pour votre zèle dans les conditions d’enseignement et d’accueil si particulières actuellement. Qu’en ces lieux, Jésus-Christ soit invoqué et prié pour que la sagesse divine vous accompagne tous.
Je confie aussi à vos prières notre assemblée des évêques de France qui ne sera pas à Lourdes mais aura lieu dès ce lundi 2 durant sept journées par visioconférence, matin et après-midi. Si la forme de nos rencontres s’annonce difficile, nous avancerons notamment sur l’écologie intégrale avec le thème « cultiver la terre et se nourrir », sur la lutte contre les abus, sur la formation des séminaristes, etc. Merci de nous accompagner.
Maintenant je vous bénis au Nom du Père et du Fils et du Saint Esprit.
Confions nous à la Vierge Marie, première parmi les saintes et les saints du Ciel par la prière à Notre-Dame du Sacerdoce et demandons lui des prêtres :
Vierge Marie,
Mère du Christ Prêtre,
Mère des prêtres du monde entier,
Vous aimez tout particulièrement les prêtres,
Parce qu’ils sont les images vivantes de votre Fils unique.
Vous avez aidé Jésus par toute votre vie terrestre,
Et vous l’aidez encore dans le ciel.
Nous vous en supplions, priez pour les prêtres,
Priez le père des cieux pour qu’il envoie des ouvriers à sa moisson.
Priez pour que nous ayons toujours des prêtres,
Qui nous donnent les sacrements,
Nous expliquent l’Évangile du Christ,
Et nous enseignent à devenir de vrais enfants de Dieu.
Vierge Marie, demandez vous-même à Dieu le Père,
Les prêtres dont nous avons tant besoin,
Et puisque votre cœur a tout pouvoir sur lui,
Obtenez-nous, ô Marie,
Des prêtres qui soient des saints.
Amen.